ll est honteux d’avoir Honte au Sénégal.
Il est honteux de ne pas Mendier au Sénégal. Il est honteux d’avoir de la Dignité au Sénégal. Il est honteux d’avoir de l’Ethique au Sénégal. Il est honteux d’avoir des valeurs de morale au Sénégal. Il est honteux d’être Humain au Sénégal. Il est honteux de ne pas voler des milliards dès que surgisse l’opportunité. Il est honteux d’être Honnête au Sénégal.
La révolution technologique des moyens de communication continue d’éliminer les frontières, les distances… Dans n’importe quelle région du monde, le citoyen migrant, le citoyen exilé (in)volontaire peut suivre, accompagner et participer aux débats politiques de son pays, minute par minute. C’est grâce à cette technologie que j’ai pu, comme tous les Sénégalais attentifs, sensibles et observateurs, accompagner pas à pas l’assassinat brutal et déshumain de Monsieur La Dignité au Sénegal, comme dans plusieurs pays de la région. Et chose rare au Sénégal comme en Afrique Occidentale, on lui a refusé un enterrement digne. Mais comment savoir spirituellement, humainement et culturellement enterrer dignement si nous sommes devenus des Affamés-matériels, des Morts-ambulants, d’éternels Mendiants vaniteux et des égoistes maladifs ?
Comment sommes-nous arrivés à ce stade de la mort spirituelle, culturelle et humaine ?
Dans plusieurs sociétés sénégalaises et africaines, les amis et les parents qui ont une profonde médiumnité sont en mesure de percevoir la souffrance de l’âme errante en pleurs du défunt qui ne serait pas enterré dignement, dans le respect de tous les rites funèbres. Les membres de ces sociétés savent parfaitement que leur acte, leur négligence et leur incohérence culturels, spirituels, politiques et inhumains seront le point de départ de leur instabilité psychologique, émotionnelle, individuelle et collective, mais aussi socio-politique de leur communauté avec de possibles répercussions à l’échelle nationale. Ne voyons-nous pas que le décès et le refus de l’enterrement humain de Monsieur La Dignité plongent irréversiblement le Sénégal dans des chaos politiques, éthiques, moraux et culturels uniques ?
La longue, douleureuse, visiblement et psychologiquement insupportable et inhumaine agonie de la mort de Monsieur La Dignité a commencé quand les autorités politiques ont commencé leurs sophistiqués processus d’affammer tous les Sénégalais, y compris nos chefs coutumiers, garants de la moralité, de l’éthique et éternels amis-parents ou parents-amis de Monsieur La Dignité. Quel est le futur d’un pays qui a participé, de près comme de loin, mais aussi a accompagné l’inhumain assassinat, de même que l’inhumain et rapide débarassement du corps de Monsieur La Dignité ? Quel est le Sénégalais ou même l’Africain qui ne sait pas que nos «morts ne sont jamais morts et que leur colère peut provoquer et déclencher un violent séisme de longue durée» ?
L’assassinat de Monsieur La Dignité a tué en chaque Sénégalais et Sénégalaise, la capacité d’avoir honte, d’avoir les conditions mentales et émotionnelles de refuser d’accepter les cadeaux volés, d’avoir de l’éthique, d’avoir la dignité et d’être Humain. Notre bassesse morale est telle que presque aucun Sénégalais ou Sénégalaise ne refuserait un billet d’avion «offert» par les autorités politiques du quartier, de la ville et du pays pour aller au pélérinage au Vatican ou à la Mecque. Prier orgueilleusement -église et mosquée- dans un batiment construit avec l’argent volé par un politicien ne compromettrait-il pas toute possibilité d’être un bon croyant et d’aller un jour au Paradis ? Est-il possible éthico-religieusement d’aller au pélérinage aux lieux saints -Mecque, Vatican, Lourdes…- avec l’argent dont on sait sciemment qu’il est le produit d’un vol ? Ne sommes-nous automatiquement pas devenus des voleurs et d’immoraux croyants ? L’argent volé, le même acte est nommé «Détournement». Or, c’est le pire vol, car il compromet totalement et immédiatement la qualité de vie de milliers de personnes -impossibilité d’avoir des infrastrutures de santé, d’éducation, d’assainissement de base…- et l’avenir des futures générations. Toute personne ayant bénéfié de cet argent est aussi un voleur-assassin de Monsieur La Dignité.
Mais qu’attendre d’un citoyen ayant participé à l’ignoble assassinat et au refus de l’enterrement humanisant de Monsieur La Dignité ? Il ne vit et ne vivra que d’apparences de ces frauduleuses conquêtes matérielles et de son insatiable vanité. Il sait que le jour qu’il voudra se ré-humaniser, il signera automatiquement son propre certificat de décès car n’ayant jamais appris à vivre avec dignité, éthique et moralité ; c’est-à-dire humainement. La longévité de sa vie est liée à son pouvoir monétaire et étatique pour extraire sauvagement Monsieur La Dignité à chaque Sénégalais et Sénégalaise.
Avec cet ignoble assassinat, nous sommes devenus une misérable société collectivement qui pense petit, faussement convaincue jusqu’à la moelle épinière de sa grandeur, de son exceptionalité divine et de sa capacité à se prendre en charge. Mais comment des assassins de Monsieur La Dignité auraient des capacités éthiques, morales, culturelles et politiques pour prendre en charge la bonne marche du pays s’ils n’ont jamais eu la notion du collectif, ni du bien public ? Nous sommes devenus d’éternels mendiants sans scrupules. Mais qu’attendre d’une Nation dont les élites politiques, universitaires, journalistes, militaires, policières, gendarmes, coutumières, religieuses, les pères de famille, les aînés… n’ont comme références morales, éthiques et humaines que ceux qui ont scellé le pacte ritualisé quotidiennement de l’assassin de Monsieur La Dignité au nom de la défense des biens ensanglantés (re)distribués premièrement aux plus fanatiques convaincus défenseurs de la politique d’assassinats de Monsieur La Dignité ?
Pour mieux manger, mieux boire, mieux circuler, mieux se faire «respecter», mieux apparaître, être visible et présent constamment aux plateformes des moyens de communication, il faut automatiquement devenir un fort, un solide et inoxydable maillon d’une longue, invisible et complexe chaîne d’assassinats quotidiens de Monsieur La Dignité. Celui qui essaie de refuser est aussitôt traité par les proches -parents et amis, collègues…- de malade, d’irresponsable, de vaniteux et d’homme sans honneur.
Nous sommes devenus un Peuple qui a fait un pacte pour élire la médiocrité, le dés-honneur, le mensonge, le vol, l’assassinat comme bases morales et éthiques de notre dite bonne gouvernance. Or, un peuple aux multiples maillons d’assassins de Monsieur La Dignité est un peuple sans futur et un pays irréversiblement divisé en micro-Etats gouvernés que par des arrivistes disposés à tout pour plaire au Grand Chef. Celui qui refuse pour n’avoir jamais tué Monsieur La Dignité en lui ni auprès de ses proches, est négativement récompensé par des poursuites, des affectations au fond du pays ou la perte de son emploi. Le refus de participer à l’assasinat implique s’auto isoler, se cacher ou faire les choses en cachette. Les bons Sénégalais se cachent pour ne pas mourir.
Nous sommes devenus une société d’excellents et de compétents comédiens en auto-assassinats quotidiens de Monsieur La Dignité au nom de notre piètre survie vaniteuse. Les cadeaux achetés par l’argent volé que les parents donnent à leurs enfants dès la naissance commencent à inoculer inconsciemment et par inadvertance des instruments d’assassinat de Monsieur La Dignité chez les nouveau-nés et tout au long de leur vie. C’est-à-dire que le mort renaît en chaque enfant dont l’un des parents a été l’assassin.
Comment conjurer cette malédiction ? Pour sa survie, chaque Sénégalais doit être en même temps un habile assassin et un prédicateur des merveilles de son acte ignoble. Les récompenses proviennent toujours d’autres vols que nos excellents journalistes et intellectuels toujours invités sur les plateaux de télévision dénomment détournements. Or, cette nomination vise idéologiquement et poliquement à amenuiser l’acte immoral du vol, car un politicien connu ne peut pas être traité de voleur. Les plus compétents en assassinat ont toujours à disposition de grosses voitures, le passeport diplomatique, des sacs de milliards de francs Cfa, l’ascension professionnelle fulgurante avec des indications à des postes plus juteux financièrement et leur sécurité est garantie par d’autres prédicateurs uniformisés. Sans compter la présence assurée quotidiennement aux différentes chaînes de Tv pour continuer à enseigner comment voler pudiquement et assassiner avec une habilité sophistiquée et sans aucun remord, car il n’y a ni cadavre et ni sang.
Nos élites sont convaincues que leurs pouvoirs et privilèges ne sont que la matérialisation de leur exceptionnalité divine sur la terre sénégalaise, elles croient que leur spécifité divine les place au-delà des normes qui caractérisent le comment se comporter avec dignité. Ce sont des élus de Dieu. Ces Sénégalais divinement exceptionnels sont immédiatetés, égoistes, vaniteux car l’honneur, Monsieur La Dignité, l’éthique, la moralité ne sont que des conventions qui doivent être respectées que par le commun des mortels. Depuis cet assassinat, le Sénégal est devenu une petite embarcadère où on tue impitoyablement pour avoir où s’agripper ou juste poser une partie des fesses ; le Sénégalais dépourvu de dignité s’auto-animalise quotidiennement.
Chaque jour, par nécessité de la plus piteuse survie physiologique, matérielle ou de la vanité, on déboulonne rituellement les bases fondantes d’une société humanisante et dignificante. Comment vouloir être une Nation et un Etat respecté si nous sommes devenus que des assassins de ce qui fait l’orgueil et la grandeur d’un être humain et de son pays ?
Toutes les bases de notre humanité ne sont que de périssables marchandises qu’il faut négocier rapidement parce qu’on a des membres de notre famille, des voisins et des amis affamés matériellement, immoralement et vaniteusement. Nos âmes et nos capacités rationnelles sont amputées brutalement et grossièrement par les assassins de Monsieur La Dignité et les prédicateurs des bonnes conséquences de son assassinat. Nos élites sont un club rationellement, politiquement et civiquement amputé, sans aucune possibilité d’utiliser un type de prothèse.
La jeunesse sénégalaise, comme dans plusieurs pays d’Afrique, sait très bien qui sont les membres des clubs des tueurs de Monsieur La Dignité et les conséquences néfastes pour la dignité et l’avenir radieux de leur génération et de leur pays. Pensez-vous possible, messieurs les assassins et prédicateurs, être capables d’arrêter une foule positivement politisée et déchaînée, mais très consciente de son point d’arrivée ? Quel genre de leaders politiques, moraux, coutumiers et religieux, assassins de Monsieur La Dignité, pouvez et pourrez-vous léguer, et en même temps quel type de références serez-vous demain ?
Nous devons commencer à penser à l’organisation des assises sur la Nation, la bonne gouvernance, la démocratie, le désarmement de la jeunesse -les nervis- et ré-humaniser la société sénégalaise. Le nouveau, le vrai Sénégalais ne devra plus être le Sénégalais tonitruant, sans courtoisie, immoral, voleur et menteur programmé. Comment le Botswana est arrrivé à façonner dignement son développement et sa démocratie ? Ne serait-il pas une excellente école pour le Sénégal dont la découverte du pétrole, du gaz et l’exploitation incognito de l’or sont devenues les bases de nos mini guerres fractricides ?
Alain Pascal KALY
Dr. en sociologie. Prof au Département d´Histoire
Universidade Federal Rural do Rio de Janeiro – Ufrrj