Lundi 24 février 2025 – Lundi 24 mars 2025 : Un mois déjà, Papa, depuis que tu nous as quittés
Le lundi 24 février 2025, Bignona a perdu une figure emblématique de l’éducation et du service public : Elhadji Mamadou Niakhaté, Président du CEDA de Bignona et ancien directeur d’école à la retraite, s’est éteint à l’âge de 81 ans. Ce patriarche, ardent défenseur du savoir et de la discipline, laisse derrière lui un héritage indélébile.
Un parcours d’exception
Né en 1944 à Yaboucounda, dans le département de Bignona, Elhadji Mamadou Niakhaté était le fils du vénéré patriarche Ibrahima Niakhaté (1891-1990). Dès son plus jeune âge, son père l’inscrit à l’école coranique, puis à l’école française, où il obtient son Brevet en 1965. Son intelligence remarquable et son ambition de devenir ingénieur lui valent les encouragements de ses enseignants. Mais, obéissant à la volonté de son père, il choisit d’embrasser la carrière d’enseignant, recevant cette bénédiction paternelle : «Par la volonté de Dieu, tu n’envieras personne dans cette vie, ni un président ni un ministre.»

Un éducateur d’exception
El hadji Mamadou Niakhaté fut l’un des rares témoins vivants de la transition entre l’éducation coloniale et nationale au Sénégal. Son parcours dans l’enseignement, entamé en 1966, s’étend sur 45 ans. Il incarne la quintessence de la rigueur et de l’engagement. De 1966 à 1977, il enseigne dans plusieurs localités, telles que Mlomp, Thiobon, Tendième, et Djimande (dans la communauté rurale de Diégoune). Sa méthode, fondée sur une exigence absolue, lui vaut le surnom de «Cent pour cent» (100%), en raison du taux de réussite exceptionnel de ses élèves au Certificat de Fin d’Études Élémentaires (CEFE). Cette performance, rare à l’époque, s’explique par sa discipline, son dévouement et sa bienveillance envers ses élèves.
Après avoir servi au lycée Djignabo de Ziguinchor et à l’école Mancadian de Bignona, il a convainc les autorités de créer l’école Animation, devenue plus tard l’école Amidou Diagnil Coly, qu’il dirigea jusqu’à sa retraite en 2010. Sous sa direction, l’école s’impose comme un modèle d’excellence et de rigueur, avec des résultats qui figuraient parmi les meilleurs de la commune, voire de la région.
L’école Amidou Diagnil Coly : un modèle de rigueur
L’école qu’il dirigea depuis sa création en 1978 est rapidement devenue un lieu de référence en matière d’enseignement. L’efficacité de sa gestion financière permet d’agrandir l’établissement, qui passe de six à douze salles de classe, avec des infrastructures solides et sécurisées. Ses méthodes d’enseignement, minutieuses et exigeantes, incluant un contrôle hebdomadaire des préparations de ses enseignants, étaient un gage de qualité. Cette rigueur allait jusqu’à affecter ses élèves en dehors des heures de classe, comme en témoigne le récit de certains d’entre eux, qui se souviennent de lui les retrouvant la nuit, les forçant à réviser leurs leçons, parfois jusque dans les maisons disposant d’un poste téléviseur.
L’école, bien que bâtie avec des fonds modestes, offrait un cadre d’apprentissage sain et sécurisé. Cela s’expliquait par son rejet absolu de la corruption, qu’il refusait catégoriquement, y compris face aux tentatives de parents d’élèves cherchant à faire entrer leurs enfants à l’école par des moyens douteux.
Un combat social sans relâche
Outre son engagement dans l’éducation, El Hadji Mamadou Niakhaté consacre une grande partie de sa vie à améliorer son environnement social. Dès son arrivée à Bignona en 1977, il se bat pour l’édification d’une école dans le quartier de Médina Plateau et œuvre ensuite pour l’extension des réseaux électriques et hydrauliques, permettant ainsi à des quartiers entiers de sortir de l’isolement.
En parallèle, il se montre un modèle pour sa famille, inculquant des valeurs de discipline, de travail et de respect des traditions. Il veille attentivement sur les fréquentations de ses enfants, leur rappelant que «Dis-moi qui tu hantes, je te dirai qui tu es». Pour lui, la famille était la cellule de base du tissu social, et la réussite individuelle passait par l’éducation et la rigueur.
Un homme de principes et de valeurs
El Hadji Mamadou Niakhaté était un homme d’une grande intégrité. Son honneur et son sens du devoir étaient inébranlables, ce qui lui valut de nombreuses distinctions. En 1998, il est nommé à la tête de l’ODEL, puis du CEDA de Bignona, où il travaille sans relâche pour l’amélioration du système éducatif. En 2014, il a reçu une distinction de la part du Grand Chancelier pour son travail remarquable à la tête de la Commission de surveillance des élections. En 2016, il fut élevé au rang de Chevalier de l’Ordre du Mérite par le ministère de l’Éducation nationale, sous la houlette de Monsieur Serigne Mbaye Thiam.
Malgré ses nombreuses responsabilités et les appels de sa famille pour qu’il prenne du temps pour lui, El Hadji Mamadou Niakhaté a choisi de continuer à servir sa nation avec une détermination sans faille. Chaque mois, il achevait la lecture du Coran, toujours animée par un engagement profond envers l’humanité.
Un héritage intemporel
Aujourd’hui, El Hadji Mamadou Niakhaté laisse un héritage qui dépasse le cadre de l’éducation. Son exemple d’intégrité, de générosité et de dévouement restera gravé dans les mémoires. Son impact sur les générations successives, qu’il a formés et guidés, témoigne de la profondeur de son engagement envers la société.
Papa, un mois après ton départ, tes enfants et petits-enfants, témoins de ta bonté, te pleurent. Nous continuerons à honorer votre mémoire et à suivre votre exemple. Repose en paix, Papa, que la terre de Thiès te soit légère. Amine
Papa Ibrahima NIAKHATE