Par vocation, le lancement d’alerte est un acte citoyen, c’est-à-dire une action individuelle (ou collective) accomplie en vue de défendre l’intérêt général et de contribuer positivement à la vie en société.
Dans la plénitude de cette vocation, l’acte citoyen a pour caractéristiques de relever de l’attachement à l’éthique et de l’engagement civique, de poursuivre de bonne foi la promotion ou la défense de l’intérêt général, d’être volontaire et de s’inscrire dans le cadre des lois et règlements en vigueur. Dans sa nature, l’acte citoyen ne peut donc, ne doit donc relever que du bénévolat.
Mais dès lors que le projet de loi soumis à l’Assemblée Nationale prévoit une compensation financière, le lancement d’alerte devient une activité lucrative au Sénégal, il ne revêt alors plus le caractère désintéressé qui est consubstantiel à l’intérêt général poursuivi.
À rebours de la vertu dans la gestion publique qu’elle est censée promouvoir, cette loi participe davantage à l’instauration de la délation comme activité génératrice de revenus, ce qui est loin d’être son but..
Dans la continuité des raccourcis empruntés par les deux régimes qui l’ont précédé, avec cette loi, le nouveau pouvoir ne me paraît pas appréhender la lutte contre la concussion (n’est-ce pas de ce délit dont il est davantage question d’ailleurs ?) et la corruption par le bon bout, dont le chemin est bien plus long et plus ardu, mais dont les effets sont bien plus positifs et permanents : pour être efficace durablement, on ne combat jamais le mal par le mal. Le mal se combat par le bien.
L’efficacité de la lutte contre les maux qui gangrènent notre Administration et la promotion de la vertu dans la gouvernance publique reposent sur la stimulation de l’éthique, la valorisation des performances et la récompense du mérite davantage que sur la stigmatisation des travers, la commination des fonctionnaires et la nécessaire sanction des fautifs.
© Tounk.A
Alassane TOUNKARA