Fatime Raymonde Habré n’a rien d’une pasionaria politique. C’est une épouse qui s’est battue, qui se bat, qui se battra encore et encore pour Hissène Habré. Alors que son mari était hospitalisé dans un établissement public pour retrouver un souffle qui le quittait peu à peu. Fatime Raymonde Habré a puisé dans ses dernières forces pour produire un communiqué tard dans la nuit afin de solliciter les prières pour son époux à la santé chancelante. «Des informations de la presse sénégalaise ont fait état que le Président Habré a été contaminé au covid-19. Malheureusement, c’est bien le cas. Toujours est-il que le Président Habré est conscient et les médecins se sont mobilisés pour le soigner (…) je demande à nos parents, amis, familles et connaissances du Tchad au Sénégal et ailleurs de faire des douas pour que Dieu assiste et protège le Président Habré». Ce sera son dernier communiqué pour défendre la cause de son mari Hissène. L’ancien Président tchadien va perdre son ultime combat. le covid-19 va lui priver de souffle et causer sa mort à l’âge de 79 ans. Fatima Raymonde Habré a été la première avocate de son mari, son premier soutien, sa principale voix. Elle n’a jamais abandonné son mari. Au moment où beaucoup de personnes reviennent sur la vie du défunt mari déjà parti, son courage mérite d’être célébré, son combat contre l’injustice mérite d’être enseigné aux jeunes filles, aux femmes tout court. «C’est un exemple de fidélité et de loyauté à donner en exemple aux jeunes générations», souffle une voisine de son quartier de Ouakam où son engagement aux côtés de son mari lui vaut le respect de tous.
Fatime Raymonde Habré, deuxième épouse d’Hissène Habré, condamné à la perpétuité pour des faits commis alors qu’il était à la tête du Tchad entre 1982 et 1990, a depuis longtemps fait sien le combat de son époux.
Ça a été le cas dès leur arrivée au Sénégal lorsque, chassé par les hommes d’Idriss Déby, Hissène Habré se réfugie à Dakar. Et ça l’est encore davantage depuis qu’il a été incarcéré (en juin 2013) puis condamné (en mai 2016) pour « crimes de guerre », « crimes contre l’humanité », « tortures » et « viols ». Aujourd’hui, c’est elle qui porte, devant les médias et auprès de ses avocats, la parole de son mari.
À l’aise devant les médias, prompte à lancer des piques à ses ennemis dès qu’elle en a l’occasion, cette juriste de formation est décrite comme intelligente et cultivée, et pas uniquement par ses proches. « Elle est aussi très informée et bien introduite, notamment auprès des rebelles tchadiens », assure le défenseur des droits humains, Reed Brody. Le « chasseur de dictateurs » américain est l’un de ceux qui ont porté le combat pour que Hissène Habré soit jugé et Fatime Raymonde Habré, qui l’a d’ailleurs surnommé « Reed Bloody » (Reed le Sanglant), lui voue une haine tenace.
Fatime Raymonde Habré et son époux n’ont jamais reconnu la légitimité du tribunal qui jugea et condamna l’ancien président. Tout au long de son procès, Hissène Habré s’est d’ailleurs muré dans le silence. Et si sa première épouse se rendait fréquemment aux audiences, Fatime Raymonde Habré n’y allait pour ainsi dire jamais. Du procès de son mari, qu’elle qualifia « d’inique », elle ne reconnut pas non plus le verdict. Et lorsqu’elle critiqua la justice sénégalaise, le garde des Sceaux d’alors, Sidiki Kaba, l’ancien garde des Sceaux rétorqua qu’elle était tout simplement « une bonne épouse qui défend bien son mari».
Aujourd’hui encore, l’ancienne Première dame se démène pour lui. En avril 2020, au début de la pandémie de Covid-19, elle lui avait ainsi obtenu, via ses avocats, une permission temporaire de deux mois pour raisons sanitaires. Surveillé 24 heures sur 24 par deux gardes, Hissène Habré avait pu quitter sa cellule pour résider chez ses deux épouses (à Ouakam et aux Almadies) et se rendre à des rendez-vous médicaux.

Une demande de permission réitérée en avril 2021, cette fois-ci sans succès. « Le président est âgé, malade, il évolue dans un environnement humide, près de la mer. Nous espérons qu’il pourra sortir pour se soigner», avait argumenté l’un de ses avocats, Ibrahima Diawara, avant que le juge d’application des peines ne décide que les risques médicaux qu’encourrait le prisonnier ne justifiaient pas une nouvelle permission.
En réaction à ce refus, les conseils de l’ancien président ont évoqué une « gestion médiatique de la demande de permission », dénoncé une « règle de droit à géométrie variable » et critiqué la justice sénégalaise, au motif qu’elle « étouffe un homme et ses droits les plus élémentaires.»
Dans une interview accordée à nos confrères de Walfadjri en 2016, ne cachait pas qu’on avait acheté la «tête de son époux». Elle disait en substance. Fatimé Raymonde Habré affirme qu’elle n’était pas «étonnée» du verdict du Tribunal spécial qui a condamné l’ancien président du Tchad. «Cette décision (…) n’a pas étonné», a-t-elle dit à Walf-Tv. La conviction de Fatimé Raymonde Habré est que l’«on a acheté la tête de Hissène». Mme Habré avance qu’une coalition internationale et 18 milliards FCfa ont été mobilisés contre son époux. Elle accuse le système de la Françafrique d’avoir orchestré le procès de son époux. «Ce monstre-là qui est là, fort dangereux qui nous étouffe. Ce monstre a enrôlé des hommes qui sont dans le système de la Françafrique, ce sont eux qui sont aussi aux commandes de l’Afrique depuis 50 ans», a-t-elle dit, tout en défendant Habré qui, selon elle, «a quitté le pouvoir depuis 1990 et n’a aucune activité politique. C’est un homme qui vit tranquillement, ne s’immisce dans aucune activité d’autrui, n’a jamais dérangé les relations entre le Tchad et le Sénégal»
L’ex-chef d’État tchadien est décédé ce mardi 24 août des suites du Covid-19 à l’âge de 79 ans. Il avait été hospitalisé fin août à Dakar, au Sénégal – où il purgeait sa peine de prison à perpétuité – après avoir contracté la maladie.
Membre de l’ethnie pastorale touboue, Hissène Habré a grandi dans le désert du Djourab. Après l’indépendance, il est nommé sous-préfet par le président Tombalbaye. Cette même année il part pour la France où il réalise un long parcours scolaire. Il passe notamment par l’institut d’étude politique.
En 1972, il rentre au pays. Rapidement il fonde une rébellion qui se fait connaître par l’enlèvement d’occidentaux, notamment la chercheuse Françoise Claustre. Le 4 avril 1975, le commandant français Galopin, venu négocier pour la libération d’otages français est torturé et exécuté.
Dans les conflits de l’époque, il se pose en défenseur de l’intégrité du Tchad face aux appétits libyens. Habré est nommé Premier ministre en 1978, mais très vite les luttes intertchadiennes reprennent. Il renverse le président le 7 juin 1982. Il reste à la tête de l’État tchadien durant près de 8 années avant d’être renversé à son tour en 1990 par Idriss Déby. Ses années de pouvoir sont marquées par de nombreux crimes. Une commission d’enquête, après sa chute parle de quelques 40 000 morts.
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