Il y a 206 ans,le royaume de France et le royaume du Walo signaient le traité de Ndiao (Ngio) ; début de la colonisation agricole au Sénégal , et qui sera à l’origine de la création de la ville de Richard-Toll et fera de Dagana la capitale administrative du Walo .
Après la défaite, en 1815 des armées napoléoniennes face aux forces coalisées dirigées par les Britanniques, un traité de paix dit de Vienne fut signé entre la France et l’Angleterre comportait une clause qui stipulait la rétrocession des possessions françaises au Sénégal.
L’Angleterre acceptait de rendre le comptoir de Saint-Louis (qu’elle occupait depuis 1809 à 1817) aux Français à la condition qu’ils abolissent la traite négrière.
Afin de prendre le contrôle du comptoir de Saint-Louis Sénégal, la France envoya une expédition navale le 17 juin 1816 composée des navires : la corvette « l’Echo », la flûte « la Loire »,du brick « l’Argus » et de la frégate « La Méduse » ayant à son bord plus de 400 passagers qui appareilla sous les ordres du commandant Hugues Duroy de Chaumaray, avec à son bord le futur gouverneur du Sénégal, le colonel Julien Désiré Schmaltz accompagné de sa femme de leur fille, de scientifiques, de soldats et de colons
L’inexpérience de l’équipage, provoqua l’échouage de la frégate la Méduse sur le banc d’Arguin sur la côte nord mauritanienne.
Les 147 naufragés pour se maintenir à la surface de l’eau construisirent un radeau qui dériva en pleine mer
L’épave ne sera retrouvée que deux semaines plus tard , les secouristes horrifiés découvrirent la majorité des marins morts sur le radeau et certains ont été jetées à la mer après avoir enduré la faim, la déshydratation, la folie et même l’anthropophagie.
Nombreuses sont les personnes qui apprécient le magnifique et terrible tableau de Géricault qui se trouve actuellement au musée du Louvre à Paris connu sous le nom du « Radeau de la Méduse » qui relate cette tragédie.
Beaucoup plus rares sont celles qui sont capables de localiser, de dater l’événement et de le relier à la signature du Traité de Ndiaw (Ngio).
Le colonel Julien Désiré Schmaltz, après moult péripéties avait réussi à gagner à pied le comptoir de Saint-Louis , ou il prit ses fonctions de Commandant pour le Roi et administrateur du Sénégal et dépendances.
La mission que le Ministre des Colonies, le Baron Portal avait assignée au Colonel Schmaltz était de créer une colonie agricole au Walo..
Le Colonel Schmaltz, chargé d’appliquer cette nouvelle politique coloniale essaya d’abord en vain d’acquérir des terres au Fouta et au Cap vert, finalement, il porta son choix sur le royaume du Walo pour ses projets de colonisation agricole.
Dans une lettre adressée au Ministre des Colonies, le Baron Portal le 4 septembre 1819 le Colonel Schmaltz disait ceci « J’ai toujours soigneusement observé les pays que j’ai parcourus et je n’ai pas vu de plus beau, de plus propre à de grandes entreprises que le Sénégal. Les bords du Gange ne m’ont point paru plus fertiles que ceux de notre fleuve et je n’ai le moindre doute d’y réussir les cultures qu’on y voudra ».
Pour rappel du contexte c’était le début de la révolution industrielle en Angleterre, la machine était en train de remplacer la force de travail humaine ou animale dans l’activité economique .
L’Angleterre, puissance dominante préconisait l’abolition de la traite négrière afin de trouver des débouchés pour ses nouvelles machines à vapeur.
Dans un rapport daté le 5 juin 1819 adressé au Ministre, Secrétaire d’Etat du Département de la Marine et des Colonies, le Colonel Schmaltz relatait les péripéties et négociations pour l’acquisition de terres au Royaume du Walo en ces termes:
« Arrivé au village de Ngio (Ndiao) , je rencontrais le brack et les principaux chefs du pays de Wallo qui s’y étaient réunis pour l’entrevue que je leur avais demandée. Sur la première ouverture que je lis des vœux du Gouvernement au boukanigue Giourbel, ou premier Ministre, le brack me fit prier de remettre au surlendemain la conférence que nous devions avoir ensemble, vu que l’importance des matières qui allaient être traitées lui faisait regarder comme indispensable d’y appeler un plus grand nombre de chefs et quelques habitants les plus notables du pays.
« Le 7 mai, le Brack, les chefs et beaucoup des principaux habitants de Wallo se rendirent à bord de l’Isère. Je ne tardais pas à m’apercevoir en conférant avec eux que, d’après les dispositions que j’ai expliquées plus haut, je pouvais aborder franchement la question de céder leur territoire au roi de France en toute propriété et pour toujours.
Je leur présentais en conséquence qu’ils avaient été autrefois les plus puissants des peuples riverains du fleuve ; que leur chute avait commencé par des mésintelligences avec un commandant anglais qui avait excité contre eux les Trarzas dont les pillages avaient détruit leur pays ».
Après deux jours de négociation, au soir du 8 Mai 1819, à bord du navire l’Isère ancrée sur le fleuve Sénégal en face du village de Ndiao, au nom du roi de France Louis XVII, le Colonel Schmaltz accompagné de messieurs Courtois, sous-directeur du génie ; Courau, officier attaché à l’Etat-Major; Grandin, ingénieur des Mines ; Morénas, agriculteur botaniste ; Richard, jardinier pépiniériste ; Catel, chirurgien major ; Huzard, vétérinaire ; Rouzée, interprète de langue arabe ; Rougemont, économe du Domaine particulier du roi ; Bacle, naturaliste, et- de divers habitants de Saint-Louis signa avec le roi du Walo, le Brack Amar Fatim Borso Mbodj dit Amar Boye et les principaux chefs du pays : le Diawdine Madiaw Xor Aram Bakar Diaw, le Béthio Sakoura Diop, le Maalo Ndiack Ndongo Diaw, le Diogomaye Ndiack Aram Kélar Diaw, le Marosso Fara Khoury Sayodo Mbodj, le Mangass Boubacar Daaro Mbodj, le Beurty Yérim Salma Mbodj, le Diombabakh Mangoné Boly Mbodj, le Beuk Negg Ndiourbel Birame Coura Diagne et d’autres Chefs du Walo le traité dit Traité de Ndiao (Ngio).
Ce traité devait permettre à la France, non pas d’acheter des terres, mais d’avoir l’autorisation de créer des établissements de culture et de construire des forts militaires moyennant une redevance annuelle de 11 715 ,70 francs.
article .3 la tranquillité du pays du Waalo et la sureté des établissements de culture qui y seront entrepris nécessitant des mesures de protection suffisantes pour mettre les personnes et les propriétés à l’abri de toute incursion de la part des peuples voisins, le Roi Amar Boye , les chefs ci-dessous dénommés et tous autres demandent qu’ ils soit construit, par le gouvernement français un fort au village de Dagana situé sur les frontières avec le pays de Toro et des postes moins considérables dans les autres parties du royaume, partout ou ils seront jugés nécessaires par le Commandant pour le Roi et qu’il y soit placé les garnisons qu’exigera leur défense
Aux environs de Dagana, les français construisirent l’habitation royale de Koilel qui devait tenir lieu de ferme modèle. Sur les bords de la rivière Taouey, ils créèrent le centre d’essai de Richard-Toll (du nom du pépiniériste. Richard qui y créa, avec l’aide du gouverneur Roger, un centre d’horticulture), Toll voulant dire jardin en Wolof.
Deux autres centres furent installés à Faf et à Lampsar .
Cette alliance économique et militaire entre les royaumes du Walo et de la France entraîna des réactions hostiles de tous les royaumes voisins dont le Fouta et l’Emirat du Trarza. Ce qui aboutira huit mois plus tard à la tragédie de Talatay Nder le 07 Mars 1820.
Le Diawdine Amadou Bakhaw DIAW