Dans un régime présidentiel comme celui du Sénégal, le Chef de l’état détermine la politique du gouvernement. C’est lui qui édicte la vision et dégage les orientations politiques. Le premier ministre coordonne l’action gouvernementale. C’est le chef d’orchestre qui joue une musique composée par le président. Le président qui nomme aux fonctions civiles et militaires est donc au-dessus du PM dont la signature vient toujours après celle du PR. En dehors de l’épisode de 1962 où le PM semblait avoir un pouvoir légitime tiré de son statut de chef du gouvernement et responsable politique de premier plan, tous les autres PM sont nommés intuiti personae par le PR. D’où leur fragilité institutionnelle et la précarité de leur fonction qui ne tient qu’à un décret. C’est le cas de Niass, de kaba, et des autres. Senghor à maintenu Diouf pendant dix ans à ce poste car il avait un projet et un destin pour cette homme. Il l’a préparé pour le remplacer à la tête de l’état. Après Niass, Diouf à travaillé pendant longtemps avec son ami d’enfance Habib Thiam puis avec Mamadou Lamine Loum jusqu’à son départ. Wade à accédé au pouvoir avec Niass, chef de parti (afp). C’était une récompense pour son soutien. Cela n’a pas duré car les ambitions n’étaient pas les mêmes. Cela a précipité le départ de Niass le socialiste et ancien candidat à la présidence. Entre le libéralisme et le socialisme. Il ne saurait y avoir bon ménage. Ensuite y a eu Mame Madior Boye, une première femme PM, emporté par l’affaire du Joola, le 26 septembre 2002. Puis Idrissa Seck emporté par les chantiers de Thies. Aguibou Soumare pour convenance personnelle, Macky Sall et Souleymane Ndene Ndiaye.
En 2012, avec l’arrivée de Macky Sall, Abdoul Mbaye, le technocrate banquier, puis Mimi toure, remplacé par Mahammed Boun Abdallah Dionne. Lequel est remplacé par Amadou Ba avant l’arrivée de Kaba pour un mois.
Wade et Macky sont venus au pouvoir avec des coalitions hétéroclites sans concertation ni accord sur le projet politique à dérouler. C’est la difficulté des coalitions qui gagnent au deuxième tour car on négocie les attelages gouvernementaux et le partage des postes avec tous les risques d’instabilité.
La ligne de fracture s’est opérée dans l’exercice pratique du pouvoir avec des réalités nouvelles. Ils ont senti dès le départ que leur projet personnel n’était pas en adéquation avec celui du PM et que le rythme d’exécution des projets et programmes se heurtait aux rigueurs de la gestion administrative. La non maîtrise du mode de fonctionnement de l’administration et des exigences de transparence et de bonne gouvernance y sont pour beaucoup. Wade et Macky ont été souvent confrontés aux exigences d’une administration avec un PM soucieux des principes de rigueur et de gestion. Les procédures et les signatures sont des actes de gouvernance qui peuvent dénaturer la collaboration entre le PR et le PM.
Bassirou Diomaye Faye peut échapper à ce phénomène d’impréparation à une gouvernance collégiale. Il arrive avec un parti et un projet de société et de gouvernance. Sa chance, c’est d’avoir des compagnons de route et d’avoir vécu des moments d’infortune et de fortune. D’avoir connu des parcours difficiles forge une certaines solidarité voire une complicité dans les options stratégiques. Le meilleur PM devrait donc être issu de leurs rangs avec la même compréhension du projet, le même rythme de travail, le même agenda d’exécution des promesses avancées. Ce premier ministre ne devrait être ni encombrant pour le PR ni trop effacé dans la coordination de l’action gouvernementale. Il doit servir de relais entre le PR et les autres institutions. Il faut que la Primature soit en bonne intelligence avec le cabinet qui doit être piloté par un homme du sérail. C’est à dire des éléments de base du projet. Dans ce dispositif, Ousmane Sonko devrait avoir voix au chapitre car son choix sera déterminant pour la cohérence de cette architecture et la pertinence du choix gouvernementale. Tout laisse croire que les mêmes hommes qui vont discuter au sein du parti vont trouver le même espace de concertation et de mutuellisation de leur compétences pour piloter ensemble ce projet. Car c’est sur cela que les Sénégalais les attendent. Il y a urgence à dérouler les réponses promises et qui valent cette victoire à plus de 54% dès le premier tour.
Mamadou Kasse
Journaliste formateur