Par Mamadou Lamine DIATTA
Amadou Ba est pratiquement le Chef de l’opposition avec 35,79% des suffrages engrangés lors de la toute dernière présidentielle. Le paradoxe, c’est que Bougane Guèye Dany, Thierno Alassane Sall et même Pape Djibril Fall ou Thierno Bocoum sont plus présents et plus percutants que lui dans l’espace public.
À la limite, l’on pourrait penser que l’homme fait de l’opposition par procuration via de proches collaborateurs comme Mamoudou Ibra Kane ou Abdou Latif Coulibaly encore qu’on peut d’ailleurs préciser que ces derniers s’expriment essentiellement pour occuper le terrain et peaufiner leur propre visibilité. En politique, le silence prolongé est souvent synonyme d’inaction.
Pour autant, il ne faudrait pas s’y méprendre .Cette situation est sans doute due à son tempérament…Le Challenger du Président Bassirou Diomaye Faye, c’est trivialement peu de punch, peu de peps et pas de formules piquantes pour titiller et déstabiliser l’adversaire. Ses contempteurs disent d’ailleurs qu’il dégage peu de charisme. Pourtant si l’on se hasarde à dresser son portrait psychologique pour ne pas dire moral, c’est quelqu’un qui donne l’air d’un profil cérébral plutôt calibré pour l’introspection et la discrétion basée sur l’efficacité. Généralement, ce sont de fins stratèges qui ratent rarement leurs cibles même s’ils semblent lents à la gâchette. Des atouts non négligeables dans un Sénégal tourmenté où l’agitation débridée fait que les choses vont dans tous les sens au grand dam d’un peuple foudroyé par une crise économique lancinante souvent exacerbée par des débats de caniveau.
Amadou Ba, c’est le genre d’homme plus à l’aise dans l’ombre que sous la lumière. Il n’est pas le sémillant Ousmane Sonko et vice-versa ! Pourtant un célèbre proverbe explique que « si on ne se change pas, on ne grandit pas». Autrement dit, rien ne s’offre sur un plateau d’argent et le patron de la « Nouvelle responsabilité » est obligé de se réinventer pour être plus imaginatif et plus combatif afin de mieux occuper sa place dans le landerneau politique. C’est son nouveau job qui l’exige pardi !
Même pour faire ce grand rassemblement au King Fahd Palace, il a fallu l’initiative d’un comité restreint piloté par Cheikh Oumar Hann avec l’appui de Zahra Iyane Thiam, Abdou Latif Coulibaly, Mamoudou Ibra, Oumar Sow et autres. Comme si Amadou Ba fonctionne en usant d’éclaireurs pour lui baliser le chemin. Autrement dit, l’initiative est juste une réponse à l’appel pressant du peuple. « Je vous ai entendu, je vous ai également compris».Ce narratif n’est pas courant dans cette jungle politique. L’ancien Professeur de Diomaye et Sonko réagit comme s’il était contraint et forcé. Avec ses ex camarades de l’APR, le malaise est profond d’autant que le fossé est devenu abyssal.
Devant une foule impressionnante venue lui prêter main forte, Amadou Ba n’a nullement prononcé le nom de Macky Sall son ancien patron. En termes de communication, cela veut dire tout simplement qu’il conjugue sa relation avec le quatrième Président de la République au passé pour aborder l’avenir avec un nouveau référentiel et des perspectives plus rafraîchissantes. Pour autant, Ba n’a également pas critiqué son ancien mentor encore moins les fidèles faucons de ce dernier. En fin stratège, il a fait sien le célèbre adage : « Ne critique pas l’eau que tu as bue quand tu avais soif » surtout que nul ne sait de quoi demain sera fait.
Le lancement officieux de cette formation politique dénommée « Nouvelle responsabilité » traduit clairement l’émiettement programmé de ce qui reste de Benno Bokk Yaakar en général et de l’héritage Macky Sall en particulier.
Pourtant un pays a besoin d’une opposition forte, percutante et surtout bien organisée avec une stratégie affinée, aiguisée et intelligente. Il s’agira clairement d’une plus –value pour la qualité du débat public d’autant qu’aucun gouvernant au monde n’a la science infuse.
Au regard des nombreuses erreurs de débutant du tandem au pouvoir, Amadou Ba Leader de l’opposition quasiment aphone, devrait prendre rapidement ses responsabilités pour incarner ce rôle capital pour la vitalité de notre démocratie. La prochaine consultation électorale liée au scrutin législatif permettra sûrement de jauger son Leadership et surtout son courage politique. Tout le monde l’attend sur ce terrain délicat. Le temps lui est compté surtout qu’il en a déjà largement abusé.
Cet homme qui a rendez-vous avec l’Histoire a l’habitude de jouer sur du velours.Mais il sera obligé de plonger.