Pas Wolé Soyinka, non dites-moi, il n’a pas signé ce bout de papier appelé : Pétition des intellectuels contre Macky Sall. Non pas Soyinka, l’immortel Prix Nobel de la Littérature en 1986. Il vaut mieux que ça. Il n’est pas le genre á se cacher derrière les autres pour dire ses vérités. Si c’est le cas, alors bienvenu Wolé au royaume des «donneurs de leçons», intellectuels assis sur leur certitude pour traquer le Président Macky Sall dans ses derniers retranchements, façon de lui faire revenir à la raison. Noble intention. Piètre attitude. Comme un essaim d’abeilles, la pétition s’agrandit de membres gratinés, d’Africains intellectuels, binocles d’une autre époque bien vissés sur le visage, langage châtié pour prêcher la bonne parole, puisque le Sénégal est un pays á sauver des mains du Président Macky Sall.
On peut comprendre l’attitude de ces intellectuels respectables de par leur posture et de leur notoriété. Mais la pétition brandie pour interpeller le Président Macky Sall manque d’impartialité. Ce bout de papier qui porte beau le nom de pétition a l’amer goût du type partisan. Il est également dépourvu de zeste. Sinon comment comprendre les coups de fouet donnés aveuglément á Macky Sall. Et au même moment caresser le très «agressif» leader de Pastef Ousmane Sonko dans le sens du poil comme s’il n’était responsable de rien. Comme si l’opposition offrait un permis pour commettre tous les péchés possibles, á savoir brocarder l’armée de critiques outrageantes, perturber Dame Justice en l’accusant d’avoir une balance injuste, saper le moral des magistrats en les affublant de tous les noms d’oiseaux possibles. Sans que personne ne moufte. Il faut être Sonko pour oser le délire.
Les intellectuels doivent plus mettre la main à la pâte pour que le Sénégal soit repensé de façon plus profonde. Il faut reviser notre modèle démocratique qui donne des pouvoirs exhorbitants au Président de la république. Il ne faudrait pas que l’on répéte les erreurs du passé et se contenter de dire que le Président doit quitter le pouvoir comme on l’exige avec le Président Macky et que l’on érige pas des garde-fous pour éviter que son successeur ne commette les mêmes abus. Ou pire. C’est la porte ouverte á toutes les dérives.
Ces dérapages qui ont fait que le Sénégal vit des heures sombres de son histoire politique. Le dire. Ou l’écrire ne signifie pas qu’on est contre le régime de Macky Sall. Ou qu’on a acheté la carte de membre de Pastef. Mais, le constat est visible à l’œil nu : les libertés individuelles et collectives sont confisquées, une violence inouïe exercée sur des manifestants désarmés la gabegie érigée en mode de gestion, la parole publique malmenée, des arrestations tous azimuts et le bradage pour une clientèle politique de nos ressources foncières et autres ressources naturelles (minérales, énergétiques, halieutiques, forestières, en eau…). Dans ce combat, les intellectuels doivent être á l’avant-garde pour édifier les masses sur les dangers qui guettent mais la partisanerie politique n’a pas vocation à escorter leurs pas. Puisque le vent a incontestablement tourné, le mouvement de démocratisation ira s’approfondissant non sans soubresauts parfois sanglants. C’est inéluctable malgré les facteurs de blocage que sont l’analphabétisme et la pauvreté.
De toute façon, la parole des intellectuels dans nos pays où beaucoup d’entre-eux se sont « reptilisés » ou cachent mal leurs frustrations n’a plus beaucoup d’épaisseur. L’époque où un intellectuel claquait les doigts pour se faire suivre par la meute est terminée. Et puis dans cette liste de pétitionnaires, il y a en a un bon nombre qui n’apparaît pas dans l’annuaire du Who’s who local, certains n’y apparaissent même pas en filigrane avec des profils vaporeux et aussi légers que l’éther. Le mal est profond et touche tous les secteurs, même les intellectuels ne sont pas épargnés. M.T.G