Le vent de l’ingratitude qui souffle autour de Cheikh Amar a failli l’emporter. Mais il a fortement ébranlé les certitudes de l’homme d’affaires. Couvert de fleurs hier pour ses largesses financières, chanté par de nombreux artistes, dribblé par des «bandits á cols blancs» qui ont toujours pignon sur rue dans la capitale dakaroise. Trainant leurs joues repues toute honte bue. Poussant le bouchon du scandale moral jusqu’à ester en justice contre lui. Ultime acte de bassesse. Cheikh Amar subit les coups du destin, mais ne rompt pas. Lui qui a été fragilisé par des malheurs et maux de toute sorte dernièrement. Surtout ce grave accident qui a failli lui coûter la vie. Cheikh Amar n’est plus le même. Comble de malheur son fils qu’il préparait pour sa succession est parti à jamais sur la pointe des pieds. Causant désarroi et émoi chez la grande fratrie des Amar.
Aujourd’hui l’éclaircie dans la grisaille ambiante de ce Cheikh tant adulé hier. C’est qu’il va poursuivre l’exploitation des phosphates de Matam, un lourd investissement de 350 milliards de FCfa, annonçait-on en grandes pompes. Des fonds apportés par un consortium d’entreprises américaines et libanaises.
Une nouvelle qui donne du baume au cœur á tous les suiveurs du Cheikh, heureux de retrouver ce «Saliou Made Man» du secteur privé durement éprouvé par les impondérables et les coups du sort. C’est pourquoi, l’ordonnance de la Cour suprême cassant la récente et «incompréhensible» décision du ministère des mines qui avait suspendu les activités de la Société d’études et de réalisation des phosphates de Matam(SERPM), propriété du célèbre homme d’affaires est un ravissement pour Cheikh.
Ce camouflet du ministère dirigé par Oumar Sarr redonne une certaine crédibilité à la machine judiciaire.
Ce n’est que justice pour ce Saint-Iouisien bon teint qui a poussé à Sor Ndioloffène, presque dans le même coin d’où s’est extrait El Hadj Diouf, le footballeur. Il a eu 9, 75 de moyenne sur 10 à l’entrée en sixième Français. Très doué en maths. Il poursuit ses humanités au lycée Charles de Gaulle de Saint-Louis et s’applique à donner sens à sa vie. A 17 ans, une rupture brutale lui ôte ses ultimes illusions et met en émoi le quartier : son père, Abdoul, décède et emporte avec lui les certitudes philosophiques du gamin. La fratrie (2 garçons et 3 filles) fait bloc et entoure la maman. Cheikh, «l’ami» toujours accroché aux basques de son père, est groggy par l’indicible nouvelle. «Cela a été une épreuve dure à vivre. Cela m’a beaucoup marqué et même perturbé mes études. Mais après, je me suis ressaisi, grâce à Serigne Saliou qui a joué le rôle de père pour moi», ajuste-t-il. Son père l’avait emmené tout jeune faire acte d’allégeance au Khalife de Bamba.
Passée la douleur, le petit Amar, descend à Dakar et le Lycée Maurice Delafosse lui tend les bras pour ses études secondaires. Puis, cap vers la France pour des études commerciales : il s’habitue très vite au triptyque parisien : métro, boulot, dodo. Il fait des piges à Leclerc Distribution, saisit, de son flair précoce de manager, une occasion en or dans le domaine des tracteurs et rentre au Sénégal.
A Khelcom, les vastes périmètres de 50 mille hectares de Serigne Saliou ont besoin de matériels. Le fils de Bamba fait appel à lui. Cheikh Amar ne sait pas encore qu’il file vers son grand destin. Il s’occupe de toute la logistique des champs du marabout et décide de mettre entre parenthèse son expérience européenne pour définitivement rentrer au pays. Avec un Bac + 2 en actions commerciales. Amar ne traîne aucun complexe face au CV débordants de ses concurrents, croit-il. De son séjour européen, il a retenu l’essentiel : «Le sens de l’organisation et le respect des rendez-vous.»
Il cultive la rigueur dans son business et se fait une obsession de réussir dans l’agriculture. Car, c’est «le moteur du développement».
Une seule image pour comprendre la réussite vertigineuse de Cheikh Amar : en 2002, le Président Wade est au pouvoir depuis 2 ans et arrive avec des idées fertiles pour le domaine agricole. La Foire de l’agriculture bat son plein au Cices. Le Président traverse son stand et croise un bout d’homme en costume debout comme un piquet. Il lui serre la main et passe.
L’année suivante, en 2003, le Président Wade s’arrête dans le même stand et félicite Cheikh Amar pour le matériel agricole performant, devant les caméras de la télé. Le bonhomme vient de séduire le Sénégal.
Le jour où Cheikh Amar a séduit le Sénégal
Une idylle est née, un respect, une affaire en or aussi. La critique locale rue sur les brancards face à cette soudaine relation, des «lâches» tapis
dans l’ombre vocifèrent sur le deal entre le Président Wade et le jeune manager qui venait, en 2002, de lancer la Tse. La transitivité est facilement faite entre les trois hommes (Wade, Serigne Saliou et Cheikh Amar). Ce dernier entend crier avec les loups, mais ses oreilles ne sifflotent guère. (Wade est le Président de tous les Sénégalais et c’est lui qui a interpellé le défunt Serigne Saliou pour lui dire : «Ce garçon est très courageux et si tous les jeunes de Dakar faisaient comme lui, j’aurais eu la paix.» C’est le président de la République qui est d’une générosité inouïe qui nous a associés à ces projets, on l’en remercie pour ça», serine-t-il. Parmi ces’ projets, la Grande offensive pour l’agriculture (Goana) et le projet de l’autosuffisance en riz occupent les journées du jeune homme et hantent ses nuits. «Le problème du riz est devenu une question de dignité nationale, il faut qu’on se batte pour ne plus importer», lance-t-il comme un cri du cœur.
En fait, Amar adore les grandes causes. L’essentiel pour lui, est que tout parte du cœur. Comme l’image de ces jeunes talibés qu’il croise tous les jours dans les rues de Dakar avec leurs sébiles. Cette gravure hideuse de Dakar le choque. «Je suis particulièrement touché par le phénomène des enfants mendiants. Je ne sais pas pour qui ils demandent de l’argent, mais cela me fait mal», dénonce-t-il. Ses remèdes ? «J’aide les gens à ma façon pour la seule face de Dieu», plaide-t-il.
Ce féru des marches au bord de la plage, adore zapper sur les « chaînes d’informations (Euronews, France 24), la Rts 1, qu’il en snoberait Hervé Mathoux, le présentateur de Canal football club Canal+ et les chaudes et rondes ambiances d’Anfield Road et Guissepe Meazza. Lui ne suit que les matches de l’Equipe nationale du Sénégal. Ambassadeur du secteur privé national, il sait qu’il est attendu pour marquer de son empreinte l’investissement privé sénégalais