Le Sénégal a été confronté récemment à de violentes manifestations, sur fond de querelles politiques, et à une instabilité sociale qui ont eu des répercussions profondes sur sa jeunesse classe majoritaire de sa population. Ces manifestations ont entrainé des morts (paix à leurs âmes) que rien ne pourrait justifier, des saccages de mangasins et destructions de matériels, des fermetures d’écoles et d’universités ainsi que d’énormes pertes économiques… tous créant un environnement difficile pour la jeunesse sénégalaise. Il serait important d’analyser de manière approfondie les impacts de ces troubles sur la jeunesse et de comprendre comment les jeunes sénégalais peuvent faire face à ces défis, en mettant en évidence leur résilience, leur mobilisation et leurs aspirations pour un avenir meilleur.
Les répercussions des manifestations sur la jeunesse
Les manifestations ont eu des conséquences déplorables sur la vie des sénégalais en général, de sa jeunesse en particulier. Les fermetures d’écoles et d’universités ont perturbé l’accès à l’éducation et à l’enseignement, privant les jeunes de leurs droits fondamentaux à l’apprentissage et compromettant leurs perspectives d’avenir et celles du pays. Car comme disait Nelson Mandela « l’éducation est l’arme la plus puissante que vous puissiez utiliser pour changer le monde». En outre, le voeu d’émergence affirmé par le Président de la République avec son programme PSE, doit, pour se réaliser, placer l’éducation et l’enseignement des jeunes au rang des priorités. Et c’est l’occasion pour nous de s’indigner face aux saccages perpétués lors des manifestations au sein des universités et plus particulièrement à l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD). Aussi, au moment où les universités sont fermées, les prisons ont ouvert leurs portes à plusieurs jeunes désormais aux avenirs incertains (parmi eux, des étudiants); alors que même certains ont été arrêtés par erreur comme c’est le cas de l’étudiant Daniel Diatta de l’INSPES de l’UCAD avec ces deux autres collègues de la FMPO et de la FST pour qui, nous prions et luttons pour leur libération. L’instabilité sociale et les manifestations ont également causé des pertes tragiques de vies humaines parmi les jeunes. Le fait le plus déplorable de ces événements. Cette frange de la jeunesse tuée dans les manifestations était bien évidemment constituée pour l’essentiel de soutiens, d’espoirs pour leurs familles et devait être protégée malgré l’ampleur des émeutes si vraiment le Sénégal est un pays démocratique. En effet, «la démocratie, ce n’est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité » nous enseigne Albert Camus; et je substituerai ici « minorité » à « peuple » bien qu’il soit numériquement majoritaire partout. De plus sur le plan économique, l’incertitude économique va engendrer une augmentation du chômage et des difficultés financières pour la jeunesse, limitant ainsi leurs opportunités d’emploi. De nombreuses entreprises secouées par les manifestations ont envoyé une bonne partie de leur personnel en chômage technique. Comme nous pourrons le lire par exemple dans le communiqué de presse du 13 juin 2023 d’Auchan Retail Sénégal mentionnant le risque de chômage technique de plus de 300 collaborateurs, indubitablement en majorité des jeunes. Autant ces secteurs suscités sont impactés de façon néfaste par les manifestations d’autres secteurs très importants pour la jeunesse le sont aussi : la finance avec la fermeture des banques, les transports, le tourisme, le sport, la culture …
La résilience de la jeunesse face à l’adversité
Malgré les défis rencontrés, la jeunesse sénégalaise doit faire preuve d’une résilience remarquable. Elle peut s’adapter aux circonstances en trouvant des alternatives pour continuer à apprendre, que ce soit à travers des plateformes d’éducation en ligne, des groupes d’étude informels ou des initiatives communautaires d’enseignement pendant la fermeture des écoles et universités. Cependant, le bémol est qu’au Sénégal dans plusieurs zones reculées l’internet n’est pas accessible; aussi certains jeunes ne disposent pas d’outils informatiques pour apprendre en ligne, faute de moyens. Ce qui explique d’ailleurs le refus des étudiants à se conformer à la décision du conseil académique de l’UCAD qui stipule la reprise des activités pédagogiques (cours, TP, TD) sous format enseignement distance. Nous estimons, considérons que la meilleure solution serait la reprise progressive des enseignements en présentiel possible avec peu d’efforts et de volonté de la part des autorités universitaires avec la collaboration des étudiants et des autres acteurs. Les jeunes doivent également jouer un rôle actif dans la reconstruction de leur société en s’impliquant dans des actions de bénévolat, des projets de développement local et des initiatives de sensibilisation sociale. On ne peut pas construire un pays en saccageant, en faisant recours à la violence à chaque fois qu’on veut revendiquer un droit ou défendre nos convictions . De même l’état doit collaborer davantage avec les jeunes, les accompagner dans leur projet d’étude et professionnel. Les gouvernants doivent s’interroger sur le comportement, la logique des jeunes qui les pousse à détruire des biens publiques, attaquer des grandes surfaces…, des maisons d’autorités, lors des manifestations. Et à la connaissance des causes de ces faits y trouver des solutions au lieu de faire recours toujours à l’adversité. Un taux de chômage élevé chez les jeunes peut avoir des conséquences économiques négatives à long terme, telles que l’inactivité, la pauvreté et l’instabilité sociale comme nous l’avons récemment remarqué au Sénégal. L’inclusion professionnelle, économique et sociale des jeunes est essentielle pour assurer un développement économique durable. Il est nécessaire de mettre en place des politiques et des programmes favorisant l’emploi, l’employabilité, l’entrepreneuriat et l’indépendance financière des jeunes afin de leur permettre de capitaliser leur potentiel et de contribuer à l’économie. Cependant l’engagement des jeunes est la première exigence pour réussir ces initiatives suggérées et il doit témoigner de leur détermination à surmonter les obstacles et à construire un avenir meilleur.
La mobilisation de la jeunesse pour le changement
Face à toute instabilité sociale et aux querelles politiques, la jeunesse sénégalaise est appelée à se mobiliser pour exprimer ses aspirations et revendications car l’avenir du pays l’appartient. Les jeunes sont disposés à utiliser les réseaux sociaux, les manifestations pacifiques et d’autres formes d’activisme pour faire entendre leur voix et défendre leurs droits. Ils peuvent mettre en place des mouvements sociaux, des associations étudiantes et des groupes de jeunes pour promouvoir la justice sociale, la démocratie et la participation citoyenne tout en respectant les lois et règlements du pays. Ainsi, la jeunesse sénégalaise sera toujours positionnée comme un acteur essentiel du changement et un catalyseur de progrès. Nous pouvons témoigner que cet engagement de la jeunesse ne souffre d’aucun manque de sincérité.
En sommes, la jeunesse sénégalaise peut faire face aux impacts des manifestations et à l’instabilité sociale avec une résilience, une mobilisation et des aspirations inspirantes. Malgré les obstacles, les jeunes sénégalais doivent montrer leur capacité à s’adapter, à se mobiliser et à se battre pour un avenir meilleur. «C’est pendant nos moment les plus sombres que nous devons nous concentrer pour voir la lumière », nous dit Aristote Onassis.
Donc Ayons de l’espoir, croyons en nous et prenons l’avenir de notre pays en main.
Par Ousseynou SOKHNA : Président Association des Grandes Écoles et Instituts du Sénégal (AGEIS) / Président Commission Pédagogique CEI UCAD